Il s’en bat les coui…
Cet article est un exutoire à ma colère, ma frustration et je suis certaine qu’à la fin, j’aurais trouvé mon Nirvana.
La raison pour laquelle je suis toujours dans ma Provence Natale est que nous faisons encore et toujours des travaux. Comme il est maintenant devenu une évidence que si nous ne sommes pas sur place, les artisans ne se déplacent pas ou viennent sur le chantier au dernier moment et bâclent la chose, il est essentiel que je sois là pour mettre la pression.
Nos maçons avaient déjà réalisé de gros travaux de rénovation il y a deux ans et nous étions enchantés du résultat final. Cette première expérience s’était très bien déroulée. Les travaux avaient été effectués dans les temps et nous n’avions pas eu à nous plaindre. Cette année, ça ressemble à la Foire de Paris !
La familiarité avec laquelle ils se comportent maintenant à mon égard indique qu’ils se sentent chez eux, en terrain conquis. Et le fait que je sois seule à la maison les pousse à faire preuve d’un grand manque de manières que j’ai du mal à tolérer. On dirait de grands gamins mal élevés.
Comme je suis souvent absente, je leur ai confié les clés. Mais ça ne veut pas dire pour autant qu’il faille en faire usage comme si la maison leur appartenait.
Le chef de ce chantier, que nous appellerons Maçon A pour plus de facilité, est incapable de frapper. Du moins à une porte. Et encore moins si je suis à l’intérieur de la pièce et que de surcroit, il me voit à travers la vitre. Cela doit lui sembler d’une évidence évidente que j’ai des yeux derrière la tête et que je dois sentir sa présence alors qu’il est sur le point d’entrer.
La première fois, j’ai bien failli sortir de mon corps lorsque d’une main lourde, il a poussé la porte. Et lorsque d’un air horrifié, mon regard s’est posé sur ses chaussures de sureté pleines de boue qu’il traînait dans mon Atelier tout propre, il est parti d’un grand fou rire. Maçon A, tu viens, sans t’en rendre compte, de signer ton arrêt de mort !
Je m’étais bien jurée, cette année, de rester discrète et de les laisser travailler. Parce que, figurez-vous - Moutie m’ayant très bien élevée - j’avais pris l’habitude la première année, d’aller les saluer à leur arrivée et de leur proposer un café. Et un matin, cette politesse m’a valu une douche froide. J’ai surpris Maçon B en train de se moquer de moi en montant ses moellons. On se serait cru à la maternelle !
Forte de cette expérience déplaisante, je m’efforce donc, cette année, de me trouver des activités à l’écart du chantier. Sauf que… ce n’est pas toujours évident ! Comme ce matin où, sortant de la douche dans mon plus simple appareil, j’ouvre la porte de mon dressing pour me trouver presque nez à nez avec Maçon A. La moutarde m’est montée au nez et je suis alors partie à la charge, en peignoir cette fois-ci, les cheveux mouillés. L’homme a eu l’air très bête et, depuis, entre dans la maison en beuglant pour manifester sa présence.
Ces travaux ne devaient pas durer plus de deux semaines sauf que plus le temps passe et moins j’en vois le bout. Mais je pense en avoir trouvé la raison. Maçons A & B débarquent à midi le lundi, énervés car ils se sont trouvés coincés dans les embouteillages, m’appellent pour me dire qu’ils sont arrivés mais qu’ils vont aller prendre le temps de déjeuner au café du village. J’en reste perplexe ! Si ça avait été mon cas, je me serais contentée d’un sandwich à la va-vite. Et bien non, pause déjeuner oblige, les voilà qui débarquent à 14 heures pour repartir à 16 heures acheter des matériaux. À ce rythme là, je me félicite de ne pas les payer à la journée.
Nos maçons arrivent en général les mains vides et vont se servir dans l’atelier de Monsieur 3xrien. C’est ainsi que j’ai vu passer nos gaines électriques, ma tronçonneuse, notre escabeau qui depuis se cache sous une couche d’enduit qui va prendre des heures à nettoyer, un niveau, et j’en oublie… Ca rentre et ça sort et je vois passer avec horreur des outils tous neufs que Monsieur 3xrien n’a même pas encore utilisés. Le week-end dernier, j’ai mis un stop à ce trafic en verrouillant l’atelier et en perdant la clé. Du coup, ils sont passés chez le voisin, qui le pauvre, n’était pas prévenu.
Pour clore cet article en beauté, il faut absolument que je vous raconte cette fameuse après-midi, la semaine dernière. Maçons A & B prennent régulièrement leur déjeuner au café du coin qui, saisissant l’opportunité, s’est mis à offrir des menus ouvriers… malheureusement très arrosés ! Déjà que cela n’est pas très rassurant de constater que nos maçons tètent bien le cubi de rosé sur le chantier (mis au frais avec la bouteille de rouge dans un seau d’eau), il leur faut également descendre la bouteille pendant le repas. C’est en réalisant tout cela, que je me suis mise à douter de la qualité du travail exécuté les après-midis. Je ne suis maintenant plus trop certaine que mon plan de travail est vraiment plan ! Mais pour m’en assurer, encore faudrait-il que je retrouve mon niveau !
Pour en revenir donc à cette fameuse pause déjeuner, jeudi dernier, j’ai été très surprise d’entendre ce grand silence, qui d’habitude indique le départ des maçons, vers onze heures. La boum boum box qui diffusait, tous les jours, radio je ne sais pas quoi, s’était soudain tue. « Si tôt ? » fut ma première pensée ! Et là, je les observe, de loin, assis à notre table de jardin, en train de prendre l’apéritif. À midi, les rats maçons quittent le navire et je ne vois plus personne jusqu’à 15 heures. Mais dans quel état rentrent-ils ?!?
Maçon A, l’œil vitreux, m’annonce que, comme ils ne comptent pas revenir la semaine suivante, ils sont allés dire au revoir aux propriétaires du café et ont ouvert une bouteille. Plutôt deux si j’en crois la couleur violacée de son nez. Je ne dis rien. Ils prétendent, tous les deux s’agiter sur un reste de chantier, rangent leurs outils et, pour se faire pardonner, m’invitent à terminer, avec eux, le cubi alors qu’ils sont déjà complètement pochetronnés.
Quelques heures plus tard, non seulement ce cubi est vide mais ils ont entamé le mien. Oui, vous avez bien lu. Une fois la poche vide, voilà que Maçon A me demande si j’ai une bouteille au frais. J’en reste sans voix. Maintenant avec le recul, je trouve des tas de reparties cinglantes mais sur le coup, je n’ai rien trouvé à protester. C’est ainsi que j’ai laissé, entre leurs mains, mon propre cubi qu’ils ont alors entrepris de démolir.
Le plus gênant dans l’histoire est que, fortement imbibé, Macon B s’est alors mis à pleurer en me parlant de ses déboires conjugaux et que Maçon A n’a cessé de me répéter qu’il s’en tapait les coui…. J’aurais franchement préféré qu’il laisse cette partie de son anatomie tranquille et quitte les lieux.
Ce qu’ils ont fait au volant de leur camion. En reculant, j’ai cru qu’ils allaient emporter la piscine hors sol et j’ai croisé les doigts très fort pour qu’ils n’enlèvent pas, au passage, le portail tout neuf.
En partant, sûrs d'eux, ils m’ont dit « à l’année prochaine » mais, voyez-vous - si j'en avais eu une paire - j'aurais aimé leur répondre "franchement, je m’en bats les coui…. de vous revoir !"